Andalousie 10 - La dernière aventure n'a pas eu lieu et voici pourquoi.
- Robert Verge
- 1 mars
- 2 min de lecture
Et pourtant elle commençait bien, dans la Cathédrale-Mosquée de Cordoue. Cet édifice est certainement l'un des plus étranges au monde, car il réunit de façon invraisemblable les temples des religions ennemies: l'Islam et le christianisme.
Durant les siècles de l'occupation mauresque du sud de l'Espagne, un sultan près l'autre faisait édifier son agrandissement de la mosquée, en respectant toujours l'architecture de base, colonnes et arcs de voûte ocre et blanc, une armée de colonnes et une voûte interminable de ces arcs élégants en succession, alignés en longueur comme en diagonale.
Après que les rois Catholiques Ferdinand et Isabelle de Castille eurent chassé les arabes, ils occupèrent vite toutes les grandes villes avec les symboles religieux évidents, les cathédrales andalouses, débauches de dorures et d'ornements. À Cordoue cependant, par quelle inspiration, plutôt que de raser le grand quadrilatère occupé par l'ensemble des mosquées séculaires, la cathédrale a été érigée en plein centre des colonnades, quasi invisible de l'extérieur des murailles, mais aussi blanche et radieuse à l'intérieur que les arches d'ocre rougeâtre étaient sombres. On a beau le raconter, il faut le voir pour le croire.
Au pourtour, et un peu comme dans toutes les grandes églises, des alcôves ont été aménagées avec des autels et une statuaire d'une grande variété. Financées par des confréries et des grandes familles, elles ont adopté des styles variés au fil des siècles. Plusieurs sont dotés de caveaux souterrains pour enterrer les nobles décédés, comme l'indique une liste de noms et de dates sur les dalles de pierre au plancher.
Je parcourais lentement les allées latérales en tant de déchiffrer certains de ces inscriptions, parfois des bouts de prières ou de cantiques qui me rappelaient mes années d'enfant de choeur. Tantum ergo sacramentum, novo cedat ritui...
Un frottement de pierre me fit soudain sursauter et reculer: une dalle bougeait au sol, s'ouvrait difficilement, laissant filtrer un trait de lumière inexplicable, mais compatible avec une résurrection des corps. J'avais le coeur dans la gorge, tout seul dans ce secteur, assistant à un événement surnaturel auquel je ne pouvais pourtant pas croire. J'essayais par réflexe d'armer ma caméra trop bien rangée jusque là, mais je ne quittais pas la dalle des yeux et mes mains tremblaient. La dalle soulevée avait pivoté de côté, juste assez pour laisser passer les deux mains écorchées du macchabée, qui réussit à se créer un espace assez large pour se hisser au dehors, sur un genou d'abord, puis se déroulant péniblement jusqu'à se tenir debout, son bleu de travail tout empoussiéré: c'était un maçon qui faisait sans doute des travaux dans la voûte, et qui avait réussi à me donner une frayeur de fantôme.
C'est pourtant bien la seule histoire vraie dans ce recueil, vous vous en doutez. Il y a des limites à faire apparaître de jolies femmes délurées et bien disposées dans toutes les situations!


Très drôle!